Témoignages

Mgr Michel Aupetit (promotion 1980)
Évêque auxiliaire de Paris

J’ai reçu ma « créance » de ma mère, comme le disait jadis Jehanne d’Arc. Nanti de cette relation intime avec le Seigneur qu’elle m’a apprise dans la prière et de la certitude, non encore explicite, que l’eucharistie est le cœur de la vie chrétienne, j’ai traversé l’enfance et l’adolescence sans avoir beaucoup l’occasion de parler de Dieu. En effet, dans ma famille ce sujet était rarement évoqué et mes frères, ainsi que mes amis d’enfance, ne semblaient pas curieux des réalités spirituelles ou de leur pratique.
Vers 20 ans, la visite de Témoins de Jéhovah, m’a fait prendre conscience de la pauvreté de mes connaissances religieuses et de l’incapacité de soutenir une controverse théologique devant des gens assurés. Aussi j’ai acheté ma première Bible, décidé à asseoir mes connaissances sur un substrat plus solide. En outre, mes camarades de faculté, posaient des questions auxquelles je ne savais pas vraiment répondre. Je mesurais le redoutable hiatus entre mes études profanes qui me conduisaient vers des connaissances approfondies en médecine et la carence sensible de mon savoir religieux qui s’arrêtait, au mieux, au niveau du CM2. N’ayant ni référent ni mode d’emploi, je lisais la Bible à la manière d’un roman en commençant par le début et poursuivant ma lecture de manière cursive. Je compris rapidement que je faisais fausse route et que la diversité des livres de l’Écriture ne se laissait pas appréhender de manière aussi triviale. Alors, ayant découvert au détour d’une prospection bibliophile, la collection « Encyclopédie catholique du XXè siècle » qui comprenait de nombreux fascicules sur l’intelligence de la foi dans tous les domaines de connaissances : scientifiques, théologiques, historiques, philosophiques, je découvrais, émerveillé, la richesse de l’enseignement de l’Église et sa capacité d’une unité spirituelle qui pouvait satisfaire mon esprit avide d’harmonie.
C’est quelques temps après, jeune médecin fraîchement installé, qu’à la sortie d’une messe dans une église de passage, je découvris le tract du Centre d’études religieuses. Honnêtement, ce qui m’a décidé ce sont les horaires qui convenaient bien à mon emploi du temps. Le programme, tel qu’il était présenté, semblait correspondre à ce que je recherchais. Donc dès la rentrée 1980-1981, je m’inscrivais auprès de Mr Jean Daujat à l’Institut Catholique où les cours avaient lieu alors. En alternance, suivant les jours où je pouvais être présent, c’est Mr Jean Daujat ou Mr Claude Paulot qui donnaient ces cours. D’emblée, j’ai été saisi par la riche nourriture intellectuelle, un peu exigeante au départ, mais qui permettait une véritable intelligence de la foi. J’y ai découvert la philosophie, qui n’était pas cette laborieuse recension des idées que l’on apprend en classe de terminale, mais une utilisation pratique de la raison qui éclaire l’intelligence. En deuxième année, la morale chrétienne sociale et familiale associait harmonieusement savoir et savoir être et m’a permis d’unifier ma vie chrétienne. La théologie de troisième année permet de saisir la grande cohérence de la doctrine de l’Église à partir des mystères et d’articles de foi, à priori difficiles d’accès par la seule raison.
Ce qui m’a beaucoup aidé et qui est particulier au Centre d’Études Religieuses, c’est l’enseignement spirituel qui était systématiquement donné au début de chaque cours. Il m’a permis de fréquenter avec bonheur la messe en semaine à laquelle, à vrai dire, je n’avais jamais songé. En outre, bien que priant depuis longtemps, j’ai commencé à pratiquer l’oraison, avec difficulté au début, mais la persévérance et les lectures spirituelles conseillées m’ont permis d’en apprécier rapidement les fruits.
Plus tard, lorsque j’ai entendu l’appel du Seigneur, après quelques résistances, je me suis rendu compte de l’utilité de ces trois années. Car l’enseignement donné au séminaire est très riche et varié, mais quelquefois manque d’homogénéité. L’avantage du cursus du CER a été de montrer la logique et la cohérence de notre foi dans un enseignement discursif et synthétique. Tout est lié et l’on comprend pourquoi ce qui a été étudié en première année est utile à l’ensemble de l’enseignement.
C’est avec beaucoup de gratitude envers Mr Jean Daujat et Claude Paulot que je donne cet humble témoignage en espérant qu’il permette à d’autres de profiter de ces années de formation si utiles à la vie chrétienne et à la mission de témoigner du bonheur d’être chrétien qui incombe à tous les baptisés.